Une fronde anti-halal menée sur les réseaux sociaux a obligé le fabricant de produits laitiers australien Fleurieu a abandonner sa certification halal et son contrat avec la compagnie aérienne Emirates arguant que la taxe qu’elle payait à cette dernière servait à financer le terrorisme.
Il est des contrées où le halal bashing, le racisme et l’ignorance de certaines personnes mal informées continuent de faire des victimes parmi les entreprises, plombant ainsi des économies pourtant mal en point. C’est le cas de la société australienne Fleurieu Milk Company qui a récemment été visée par une campagne anti-halal menée par des groupes groupes comme Boycott Halal and Halal Choices sur Facebook. Son crime? Avoir oser apposer le sigle halal sur ses yaourts. Conséquence, l’entreprise a dû faire machine arrière et renoncer à payer la taxe de 1000 $ pour obtenir la certification halal de ses produits sous prétexte que cet argent irait directement dans les caisses d’organisations terroristes. Elle a par la même occasion perdu un contrat de 50 000 $ par an qu’elle détenait avec la compagnie aérienne Emirates.
Peur de la mauvaise publicité
Bien sur, ces allégations sont fausses et semblent émaner de groupes visiblement animés par la haine. Malgré cela, Nick Hutchinson, le directeur des ventes et du marketing de Fleurieu déclare dans une interview accordée à la radio américaine ABC, que la décision d’abandonner la certification a été prise après avoir estimé que les retombées économiques engendrées par la mauvaise publicité et la fronde anti-halal nuisaient d’avantage à l’image de l’entreprise que les bénéfices qu’elle tirait du contrat qui la liait à Emirates depuis 2 ans.
Une femme a même téléphoné et accusé l’entreprise d’avoir contribuer à la mort de membres de sa famille dans les attentats terroristes du 11 Septembre
Pourtant, cette coopération avait démarrée sous les meilleures auspices, comme beaucoup d’opérations de ce genre d’ailleurs. Obtenir le fameux sésame halal est synonyme de retombées économiques conséquentes.
“Dès le début, nous savions que cela allait être un très bon coup pour l’entreprise et que cela nous apporterait une grande publicité. Ça a été un véritable succès, mais malheureusement au cours des derniers jours, beaucoup de publicité négative a été faite sur cette certification halal et sur la manière dont était dépensée la taxe que nous payons.” a-t’il affirmé. “Beaucoup de gens en Australie sont persuadés que la taxe que nous payons va directement au terrorisme. Ces allégations sont ridicules… mais beaucoup de nos fidèles consommateurs sont mécontents et commencent à s’interroger. Nous avons reçu beaucoup d’emails et d’appels. Alors, dans ce cas, oui, nous estimons que le négatif l’emporte sur le positif“.
Des emplois menacés, le ministre du commerce appelé à la rescousse
L’entreprise admet que la perte de ce contrat aura un impact financier important et craint que cela ne l’amène a supprimer des emplois. Elle espère cependant pouvoir continuer à fournir la compagnie aérienne même sans certification.
“Nos yaourt ne contiennent pas de gélatine et nous pouvons donc affirmer qu’il n’ont pas besoin d’être certifiés halal pour Emirates” Ajoute M.Hutchinson. “Nous allons essayer de faire en sorte que nos produits soient testés et ainsi obtenir des certificats qui prouvent que nos produits ne contiennent pas de gélatine et ainsi continuer à fournir, avec leur permission, la compagnie Emirates mais dans la mesure où Emirates exige que tous les produits soient certifiés, il faut admettre que c’est peu probable.”
“Nous encourageons les musulmans à continuer de consommer nos produits. Nous ne sommes absolument pas racistes et voulons continuer à exporter vers des pays musulmans à l’avenir si cela est possible.”
Interrogé sur cette affaire, Paul Phillips spécialiste de la gestion de crises sur les réseaux sociaux estime que les petites entreprises sont les plus vulnérables face aux campagnes de ce genre car elles ne disposent pas des ressources nécessaires pour contre-attaquer. Elles ont peur des retours négatifs et de la mauvaise publicité et finissent par se décourager, cessant ainsi d’innover, de faire preuve d’audace et de progresser.
Le ministre du commerce et de l’investissement, Martin Hamilton-Smith, a quant à lui exhorté les entreprises à résister à l’intimidation de ces groupes de consommateurs mal informés. “C’est un énorme préjudice qui n’a pas lieu d’exister en Australie. L’un de nos principaux partenaires économiques, l’Indonésie, est le plus grand pays musulman du monde, nous devons profiter de ces opportunités, plutôt que de les exclure.”
M.Hamilton-Smith, qui conduira une délégation commerciale l’année prochaine Moyen-Orient, a déclaré que les entreprises du sud de l’Australie vont exporté 839 millions de dollars de marchandises au Moyen-Orient dans les 10 prochains mois.
D’autres entreprises australiennes, la Byron Bay Cookie et Vili’s ont également été visées par cette campagne anti-halal au cours de l’année passée. Toutes n’ont pas renoncer à leur certification, à l’instar de Vili’s qui a refusé de se plier à la pression des réseaux sociaux.
“D’un point de vue purement économique, la certification halal apporte beaucoup d’argent à l’Australie” a déclaré son porte-parole beaucoup plus réaliste et plein de bon sens.
“Quand vous regardez ces sites (réseaux sociaux), vous avez l’impression que beaucoup de commentaires sont écrits d’une même plume et proviennent probablement de la même source. J’espére que Fleurieu n’ait pas été influencé inutilement” a-t’il enfin ajouté.
photos: Fleurieu Milk Company